La broderie de Madère

La broderie, une tradition ancestrale à Madère

La broderie de Madère est l’une des traditions ancestrales de l’île. Après une période de déclin, cet artisanat connaît une renaissance et s’exporte dans le monde entier. Entretien avec Susana Vacas qui dirige Bordal, l’une des dernières fabriques de Funchal.

Commençons par vous présenter. Vous êtes née à Madère et avez toujours vécu sur cette île ?

Susana Vacas : Je suis née à Madère, plus précisément à Funchal et j'ai toujours vécu ici sur l'île. C’est mon havre, mon paradis !  Même si j’ai parcouru et visité le monde, ma maison reste à Madère.

Comment décririez-vous l’île de Madère ?

S. V. : J'ai l'habitude de dire que j'habite là où les gens viennent en vacances ! L'île de Madère est magnifique avec des paysages fantastiques et diversifiés. Comme nous sommes éloignés du continent et sommes une petite communauté, nous avons encore beaucoup de traditions. Notre Noël par exemple est vécu avec une grande intensité en famille et entre amis ainsi que d’autres festivités : le Nouvel An, la fête des fleurs et la fête du vin… Comme Madère est essentiellement une île dédiée au tourisme, nous sommes très heureux d’accueillir les visiteurs et je peux vous assurer que nous sommes des hôtes très chaleureux !

Parmi les traditions ancestrales de Madère, il y a la broderie. Pouvez-vous nous rappeler l’histoire de cet artisanat sur l’île ?

S. V. : La broderie de Madère existe depuis le peuplement de l’île par les premiers colons portugais. Dans le passé, la broderie servait essentiellement à fournir l'église et les trousseaux des jeunes mariées. Plus tard, nous avons commencé à exporter vers l'Angleterre puis l'Allemagne, les États-Unis et l'Italie. Pour vous donner une idée de l’importance de la broderie sur l’île, dans les années 1950, existaient 50 usines de broderie à Madère et la plupart des femmes brodaient en privé.

Vous dirigez l’entreprise Bordal, l’une des deux dernières fabriques de broderie de Madère. Racontez-nous cette aventure entrepreneuriale.  

S. V. : J’ai débuté avec mon mari chez Bordal il y a 23 ans. L'entreprise était pratiquement en faillite et menaçait de fermer. Un immense travail de réorganisation interne et de développement du marché local a été mené, essentiellement pour cibler les touristes. Nous avons ouvert l'usine au monde, développé les exportations, participé à des salons à l’étranger. Pendant 10 ans, nous avons couru les salons à Florence en Italie, à Maison & Objet à Paris et deux fois à New-York !

Le succès semble au rendez-vous. Quelles sont vos productions, vos clients, vos commandes, vos lieux de vente ?

S. V. : Notez que notre production s'effectue toujours comme il y a 100 ans, avec les mêmes process et les mêmes techniques. Nous produisons essentiellement du linge de maison, des vêtements pour bébés et pour femmes. Nous utilisons des matières premières de qualité supérieure parce que nous croyons qu’une broderie de luxe comme la nôtre doit être conçue à partir des meilleures matières premières. Grâce à nos efforts à l’international et à notre boutique en ligne www.bordal.pt, nous sommes présents aux quatre coins du monde. Aujourd’hui nous livrons des clients à New-York, à Paris, aux Émirats, en Suisse, en Italie… Notre magasin-fabrique est situé au centre-ville de Funchal et peut se visiter.

La broderie, c’est aussi une histoire de transmission : parlez-nous des initiatives que vous avez mises en place ?

S. V. : Bordal existe depuis 1962 et pour notre cinquantième anniversaire, nous avons décidé de donner à voir l’histoire de la broderie de Madère. Nous avons exposé des photos grand format en noir et blanc d'usines du début du siècle dernier, de vieux documents et outils et des exemples de broderies anciennes. Notre usine est visitable. Nous avons également lancé des ateliers de broderie qui se déroulent dans notre usine. Nous proposons enfin des cours en ligne.

Crédits photos © Bordal